La production sauve les meubles
En 2020, la nutrition animale en France devrait tenir ses volumes juste au-dessus de la valeur socle de 20 Mt, en baisse de 1,5 % par rapport à l’an dernier.
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Avec des −13, voire −17 % comme en pintades ou en canard, en caille et en pigeons, certains segments de la nutrition animale très dépendants de la restauration ont fortement souffert durant le premier confinement. Très inquiets par le nouveau train de mesures sanitaires, ils pourraient souffrir encore plus, alors que les fêtes de fin d’année approchent dans une ambiance assez peu festive. Et cela, malgré les 3 M€ de la dotation du fonds de solidarité que le gouvernement a réservé pour venir en aide à ces filières fragilisées.
Globalement, les syndicats nationaux s’attendent à une baisse limitée de 1,5 % sur les volumes d’aliments produits en 2020 (voir infographie). « Ces prévisions peuvent bien sûr être amenées à évoluer en raison de l’actualité, de la répercussion de la crise Covid-19 et de la sécheresse de cet été », prévient toutefois Valérie Bris, de La Coopération agricole Nutrition animale.
L’aliment porc se tient plutôt bien, en légère croissance en raison du contexte sanitaire international et de la forte demande de la Chine. Mais les cas de fièvre porcine africaine en Allemagne inquiètent, car le géant chinois ne reconnaît pas la régionalisation, et le porc produit outre-Rhin a commencé à peser sur le marché de l’Hexagone dès début novembre.
Certaines régions s’en sortent mieux
Les volailles se contractent sous le poids du retrait des palmipèdes. Après une bonne tenue en poulet de chair durant le premier confinement, les importations sont reparties de plus belle, notamment en provenance de Pologne. Côté pondeuses, encore en croissance, le segment des œufs bruns (GMS) est particulièrement porteur alors que celui des œufs blancs (ovoproduits pour la restauration) a beaucoup souffert au printemps et s’inquiète du second confinement. En ruminants, les experts enregistrent également une baisse, le mash marquant notamment le pas pour la première fois depuis plusieurs années.
Certaines régions s’en sortent mieux. Sur les neuf premiers mois de l’année, la Bretagne affiche + 0,34 %. « La volaille a perdu 0,67 % et pourrait encore s’enfoncer avec le second confinement, mais le porc a pris 0,42 % et le ruminant continue sur sa tendance croissante, à + 2,18 % », détaille Hervé Vasseur, président de Nutrinoë. Mais d’autres sont beaucoup plus impactées comme le Sud-Ouest (lire ci-dessous).
Du côté de l’amont, la tendance du premier semestre fournie par l’Afca-Cial, sur un échantillon représentant 90 % de la production nationale, est très contrastée entre le premier trimestre positif et le deuxième en retrait, les volailles et les bovins s’inscrivant en baisse (− 5,8 % et − 2,34 %) alors que le porc se tient (+ 1,68 %), en cohérence avec les productions d’aliments. Et les aliments minéraux sont en hausse sur toutes les espèces soulignant, peut-être, un comportement plus « autonome » des éleveurs. Le cours bas du soja a en tout cas soutenu la fabrication à la ferme alors que sa forte augmentation depuis la fin de l’été pourrait rebattre les cartes.
Un recul de 2,2 % en Europe
Au niveau européen, les prévisions 2020 s’établissent à − 2,2 % en volume d’aliments composés, sous l’effet conjoint de différentes zoonoses (FPA en Asie mais aussi dans l’est de l’UE, retour de l’influenza aviaire dans l’est et le nord de l’UE) et d’un effet indirect du Covid-19 qui a incité les consommateurs à réduire leurs achats de certains produits animaux. Au total, la production d’aliments de l’UE 27 et du Royaume-Uni devrait atteindre 161,4 Mt en 2020, contre 164,3 Mt l’an dernier. Toutes les principales catégories se contractent. Les aliments pour ruminants devraient afficher − 2,9 %. Ce sont les plus impactés par le Covid, principalement par la fermeture des hôtels et de la restauration, commerciale comme collective. Tous les produits premium souffrent, de la viande de veau aux fromages, car la consommation se concentre sur les produits de base, et les éleveurs réduisent par conséquent leurs achats d’aliments composés. Cette tendance n’a été que partiellement compensée par la hausse de la demande dans les pays les plus à l’est de l’UE, qui ont beaucoup souffert de la sécheresse et disposent donc de stocks de fourrage limités.
L’aliment porc devrait afficher une baisse également, probablement de 1,1 % mais pourrait prendre la tête des productions devant la volaille qui marque vraiment le pas avec − 2,7 %, après plus d’une décennie de croissance.
De façon générale, la nutrition animale française a tenu durant le premier confinement, s’adaptant aux demandes erratiques très fortes les deux premières semaines, parfois très faibles ensuite. Selon une enquête de LCA Nutrition animale, la crise Covid du printemps a eu un impact économique limité pour 89 % de ses adhérents. « Nous avons tous eu des surcoûts pour les équipements de protection et, surtout, l’organisation des équipes, explique Frédéric Monnier, vice-président de LCA NA et DG de la Cavac. Mais, clairement, ce qui a le plus pesé, ce sont les baisses de volumes dans les filières les plus impactées et, donc, les pertes de marché. »
Évolution modérée des structures
Côté industriel, 2020 marque la mise en place opérationnelle d’Eureden, né du regroupement de Triskalia et Groupe d’aucy au 1er janvier. Le nouvel ensemble se sépare de sa filiale Ronsard (n° 4 du marché de la volaille) au profit du sarthois LDC. L’accord, officialisé le 20 juillet, comporte la reprise de sept sites d’abattage transformation (775 salariés) et la signature d’un contrat d’approvisionnement de volailles (dindes, poulets, canards) et de partenariat avec les éleveurs de la coop, ce qui sécurise aussi leur appro en aliments.
L’autre grande évolution, moins visible, est le changement de philosophie au sein de Wisium (ex-Neovia), repris l’an dernier par l’américain ADM. Après un premier plan très vite dès la reprise en 2019, les équipes bougent et les structures s’allègent en France comme ailleurs. Ainsi ADM a vendu les usines d’Indonésie, fondées par Guyomarch, au néerlandais De Heus qui possède des usines dans toute l’Asie désormais.
Parmi les autres évolutions de l’année, à noter aussi la reprise de Vetinnov (compléments alimentaires pour chiens) par Le Gouessant qui continue à se diversifier, de Biomat par Michel, qui conforte son pôle bio, et la fusion de La Dauphinoise avec Terre d’Alliances.
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